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Gédéon Ouimet

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2e premier ministre du Québec

27 février 1873 au 22 septembre 1874

Conservateur

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Il y a 200 ans, Gédéon Ouimet naissait. Maire, député, ministre puis brièvement le deuxième premier ministre du Québec, il est de ceux dont la mémoire n’a pas résisté à nos livres d’histoire. Cette exposition vous permettra d’en apprendre davantage sur ce premier ministre méconnu des Québécois.

 

Bonne visite !

 Recherche et rédaction en collaboration avec Jérémie Poirier 

Homme

L’homme

Gédéon Ouimet est né à Laval (Sainte-Rose), le 2 juin 1823. Il est le fils de Marie Bautron dit Major et de Jean Ouimet, cultivateur. 26e enfant de celui-ci sur une fratrie de 26, on peut compter dans ses frères André Ouimet, avocat, patriote et homme politique, que L.O. David décrit dans Les patriotes de 1837-1838 en ces termes : « [André] Ouimet fut une des premières victimes des mandats d’arrestation du 16 novembre 1837. Sa qualité de président des Fils de la liberté lui donnait droit à cette faveur. […] Il restera huit mois en prison. C’était long pour un homme accoutumé à une vie d’émotion et d’activité. […] Il avait été admis au barreau en 1836, et avait eu pour associé l’infortuné C.-O. Perrault, qui fut tué, l’année suivante, à Saint-Denis. Il exerça plus tard en société avec M. le juge Sicotte et M. le protonotaire Hubert. C’était un excellent avocat, un orateur populaire. Il était grand, mince, brun, beau ni de figure ni de taille, mais d’une physionomie intelligente et sympathique. […] Il mourut, le 10 février 1853, à l’âge de quarante-cinq ans, vraiment regretté de tous ceux qui l’avaient connu. »

André Ouimet, est un Patriote et le frère de Gédéon Ouimet. « Natif de Sainte-Rose (Laval), André Ouimet (1808-1853) est l'un des leaders patriotes les plus connus. Fils de Jean Ouimet et de Marie Beautron dit Major, il est le quinzième d'une famille de 26 enfants. À la fin de l'été 1837, il fonde l'association des Fils de la Liberté en compagnie de plusieurs autres jeunes Patriotes. Il devint alors le président de l'aile politique du mouvement (la section civile). Ouimet est arrêté juste avant les batailles de 1837 et passe huit mois en prison au Pied-du-Courant à Montréal avant d'être libéré. Par la suite, il se consacre surtout à sa carrière d'avocat et exerce son métier dans la région de Montréal, où il est reconnu comme un orateur hors pair. Il est le frère aîné de Gédéon Ouimet, placé en apprentissage dans son cabinet. André Ouimet laisse à la postérité un journal au ton très sarcastique, Journal de prison d'un Fils de la Liberté, 1837-1838, rédigé lors de son séjour en prison. » - Histoire de raconter Le Vieux-Sainte-Rose

Illustration d'André Ouimet.

Bibliothèque et Archives du Canada

Auguste Achintre présente Gédéon Ouimet, dans Portraits et dossiers parlementaires du premier parlement de Québec, comme étant « doué d’une physionomie ouverte et prévenante, les traits son virils, le front large, les yeux intelligents ; lorsqu’il parle, le ton est naturellement grave, la phrase correcte, la pensée sans ornement, mais substantielle. » Il épouse à Montréal, le 13 août 1850, Marie-Jeanne Pellant, fille d’Élisabeth Lionais et de feu Alexis Pellant, cultivateur. Ils ont quatre fils et trois filles qui atteignent l’âge adulte. L’une de ses arrière-petites-filles, Denyse Ouimet, est la seconde épouse de l’écrivain Georges Simenon.

 

Études

 

Auguste Achintre rapporte dans Portraits et dossiers parlementaires du premier parlement de Québec, « suivant un antique usage, [il] fut triomphalement porté au presbytère et offert comme dîme au respectable curé de la paroisse » de la même manière qu’on donnait alors au curé le vingt-sixième minot de blé. « En acceptant ce don, le pasteur prenait la charge de cette paternité spirituelle. Le bon curé s’en serait acquitté de sa tâche en conscience, sans la mort qui vint le frapper à quelque temps de là. »

 

Le Dictionnaire biographique du Canada poursuit : « Ses parents l’inscrivent en 1834 au Séminaire de Saint-Hyacinthe où il poursuit, en dépit d’un bon départ, des études plutôt médiocres. Peut-être est-ce la raison pour laquelle on l’envoie en 1837 au petit Séminaire de Montréal. Il commence en 1839 son stage en droit dans le cabinet de son frère André, l’ancien président de l’aile politique des Fils de la liberté. » Il est admis au barreau de Montréal le 26 août 1844.

 

Profession

 

Gédéon Ouimet mène au moins deux carrières. L’une en droit et l’autre en politique, comme beaucoup le font à l’époque.

 

 Élu maire de Vaudreuil 

 

Selon le Dictionnaire biographique du Canada, « durant son stage, Ouimet a été en contact avec la clientèle de ruraux qui fréquentaient le bureau de son frère. Il va s’établir à Saint-Michel-de-Vaudreuil, paroisse qui englobe la seigneurie de Vaudreuil. La paroisse est érigée en municipalité en 1845 et, le 12 avril 1850, en municipalité de village. » Durant son passage à Vaudreuil, il devient maire de la municipalité de 1852 à 1854. C’est ainsi que le jeune Ouimet fait son entrée en politique.

 

À propos de sa carrière en droit, Gilles Boileau relate qu’« il commença d’abord sa carrière d’avocat à Vaudreuil, sur les rives du lac des Deux-Montagnes avant de s’établir à Montréal où il s’associa, parmi tant d’autres, à deux avocats qui passèrent eux aussi une bonne partie de leur vie dans la politique active, Joseph-Adolphe Chapleau [futur premier ministre du Québec] et Charles Champagne dit Laplante [Député de Deux-Montagnes entre 1876 et 1882]. »

 

Le Dictionnaire biographique du Canada ajoute qu’à « la fin de son mandat, il s’installe à Montréal, où il s’associe avec Louis-Siméon Morin [député de Terrebonne entre 1857 et 1861, de Laval entre 1861 et 1863 et ministre dans le cabinet Cartier-Macdonald de 1860 à 1862] et Louis-François-Wilfrid Marchand sous la raison sociale de Ouimet, Morin et Marchand. Il fait parti du conseil et du comité des examinateurs du Barreau de Montréal. Il collabore à la Collection de décisions du Bas-Canada, recueil périodique des jugements prononcés par les diverses cours civiles du Bas-Canada, que John Lovell publie à compter de 1857. »

 

Le 28 juin 1867, il est fait conseiller de la reine. Gilles Boileau pense que « son affiliation à une étude légale des mieux connues de la province a sans doute compté pour beaucoup dans sa nomination à la tête du barreau. » En 1869, il est élu bâtonnier du Barreau de Montréal et bâtonnier du Barreau de la province de Québec en 1869 et en 1870. Il est aussi président du Conseil général du Barreau de la province. Il exerce les fonctions de substitut du Procureur général à Sainte-Scholastique.

Selon Partez à la découverte de Vaudreuil-Dorion, la résidence de Gédéon Ouimet était situé à l'emplacement de l'actuelle résidence du 44, rue Saint-Michel à Vaudreuil-Dorion. « Cette résidence est érigée sur l’ancienne propriété du lieutenant-colonel Antoine de Lotbinière-Harwood, premier fils de Robert Unwin Harwood et de Louise de Lotbinière. M. Gédéon Ouimet, Premier ministre du Québec (1873-1874), y a aussi tenu résidence avant que l’architecte vaudreuillois Siméon Brais ne construise la résidence actuelle pour le notaire Jean-Baptiste-Alexandre Favreau. Cette résidence qui a subi d’importantes rénovations depuis lors s’inscrivait dans l’esprit du style «Four Square» américain, très populaire dans la région. » 

Partez à la découverte de Vaudreuil-Dorion : 10 itinéraires patrimoniaux marqués au sceau de l'histoire. Ville de Vaudreuil-Dorion. Vers 2011.

Bibliothèque et Archives nationales du Québec


L'HOMME
 

Joseph-Adolphe Chapleau, stagiaire, associé de Gédéon Ouimet et futur ministre dans son conseil des ministres.

Portrait du premier ministre du Québec Joseph-Adolphe Chapleau.

Collection Dave Turcotte

Charles Champagne dit Laplante, associé de Gédéon Ouimet.

Photographie de Charles Champagne dit Laplante. Vers 1900.

Bibliothèque et Archives nationales du Québec

Fonds J. E. Livernois Ltée.

Louis-Siméon Morin, associé de Gédéon Ouimet.

Illustration de Louis-Siméon Morin.

Bibliothèque et Archives nationales du Québec

 

Généalogie de Gédéon Ouimet

Lignée directe

de Jean Ouimet

à Gédéon Ouimet

 

1. Jean Ouimet

n. 00-00-1634 Vrigny, Ar. de Reims, Champagne, France  d. 18-11-1687 Sainte-Famille, I.O.

 

Marie Renée Gagnon  m. 03-10-1660 Château-Richer

n. 08-04-1643 Québec  d. 00-00-1695 Sainte-Famille, I.O.

[fille de Jean Gagnon et Marguerite Cauchon]

 

2. Pierre Ouimet

 

Marguerite Pominville  m. 04-01-1716

 

3. Cyprien Ouimet

 

Marie Josephte Cyr  m. 13-02-1764 Laval

 

Marie Anne Aubin  m. 24-01-1780 Laval

 

Geneviève Rose Dinelle  m. 20-02-1797 Montréal

 

4. Jean Ouimet

n. 15-04-1765 Laval  d. 19-06-1839 Laval

 

Marguerite Bélanger  m. 03-03-1783 Laval

n. 00-00-1764 Laval

d. 20-02-1798 Laval

[fille de Jean-Baptiste Bélanger et Marie Françoise Chabot]

Marie Beautron  m. 21-10-1799 Laval

n. 03-07-1780

 

5. Gédéon Ouimet

n. 02-06-1823 Laval

 

Marie Jeanne Pellant  m. 13-08-1850 Montréal

[fille de Alexis Pellant et Élisabeth Lionais]

LÉGENDE

n. Naissance 

d. Décès 

m. Mariage

Merci à Gérard Héroux

pour la recherche généalogique.

Le député

 Élection législative canadienne de 1858 

 

L’élection législative canadienne de 1858 se tient du 28 novembre 1857 au 13 janvier 1858 dans la Province du Canada. Elle élit les députés du 6e parlement du Canada-Uni.

 

Gédéon Ouimet entre dans la vie politique avant même l’union des trois colonies de l’Amérique du Nord britannique. En effet, le Dictionnaire biographique du Canada explique : « À l’instar de son frère, Ouimet s’était rangé au moment de l’Union du côté de Louis-Hippolyte LaFontaine et de Robert Baldwin et, maintenant avec [Louis-Siméon] Morin, il milite dans le Parti libéral-conservateur. Aux élections générales de 1857–1858, durant lesquelles la coalition politique formée en 1854 subit son premier test populaire, Morin est élu sans opposition dans Terrebonne et, en janvier 1858, Ouimet défait Charles Daoust, rédacteur du Pays, dans Beauharnois. Ouimet a bénéficié de l’appui du clergé catholique, que le plaidoyer de Joseph Papin en faveur des écoles neutres, appuyé par Daoust, avait inquiété. »

 

Le Dictionnaire biographique du Canada continue : « Les résultats des élections révèlent le clivage politique qui oppose le Haut et le Bas-Canada : les “bleus” dans le Bas-Canada et les réformistes dans le Haut-Canada ont consolidé leurs positions. Le gouvernement de John Alexander Macdonald et de George-Étienne Cartier, […], dispose d’une trentaine de voix de majorité à l’Assemblée, mais est minoritaire parmi les représentants du Haut-Canada. Ce déséquilibre favorise les querelles partisanes et exacerbe les réformistes qui demandent la représentation proportionnelle à la population. Ouimet fait ses premières armes parlementaires dans ce climat survolté. Il se révèle un député de l’arrière-ban soucieux de ses commettants, travailleur, loyal envers ses chefs et capable en des moments difficiles de pertinentes interventions. »

Depute

Buste de Louis-Hippolyte LaFontaine réalisé par le sculpteur Louis-Philippe Hébert. 1885.

Collection Dave Turcotte

 Élection législative canadienne de 1861 

Wikipédia décrit que « l’élection législative canadienne de 1861 s’est tenue du 10 juin 1861 au 15 juillet 1861 dans la Province du Canada dans le but de former le 7e parlement [du Canada-Uni]. Lors de cette élection, le Parti rouge finit par se fondre complètement aux libéraux. La gauche fait élire exactement 29 députés du côté est et du côté ouest de la province. De plus, une alliance entre les mouvements conservateurs et réformistes permet également une équité de 35 députés du côté est et du côté ouest. Cela permet un équilibre régional dans le gouvernement. Les libéraux réussissent à faire des gains au profit des conservateurs et des réformistes, sans réussir à former une majorité. »

 

Le Dictionnaire biographique du Canada rajoute : « Aux élections de l’été de 1861, Macdonald et Cartier conservent l’appui des électeurs, même si les bleus perdent une douzaine de circonscriptions dans le Bas-Canada, dont Beauharnois, où Ouimet a essuyé une défaite » contre Paul Denis, réélu en 1863 duquel son mandat prend fin avec l’avènement de la Confédération, le 1er juillet 1867.

 

Retour au droit

Ouimet retourne à la vie privée tout en continuant de militer au sein du Parti libéral-conservateur. Le Dictionnaire biographique du Canada précise que « Ouimet s’adonne à la pratique du droit, qu’il n’avait d’ailleurs pas abandonnée. Le jeune Joseph-Adolphe Chapleau [futur premier ministre du Québec] vient de faire son stage chez Ouimet et Morin. Par la suite, Ouimet remanie son bureau au gré des circonstances : Moreau, Ouimet et Chapleau (1862–1866), Moreau et Ouimet (1866–1871), Moreau, Ouimet et Saint-Pierre (1872–1874), Moreau, Ouimet et Lacoste (1875–1876). Tout au long de ces années, Ouimet gagne en stature tant au prétoire que dans les cercles libéraux-conservateurs. »

 

 Élection québécoise de 1867 

Le 1er juillet 1867, la Confédération canadienne devient réalité malgré l’opposition des libéraux. En août et septembre 1867, les premières élections québécoises ont lieu afin d’élire les 65 premiers députés à siéger à l’Assemblée législative aujourd’hui nommée l’Assemblée nationale du Québec.

 

Wikipédia explique que « le Parti conservateur du Québec, dirigé par Pierre-Joseph-Olivier Chauveau, remporte cette élection et forme un gouvernement majoritaire. Chauveau, nommé premier ministre du Québec à titre provisoire plus tôt dans l’année, le premier à occuper ce poste, est confirmé dans ses fonctions. » De son côté, Gédéon Ouimet est élu sans opposition député de la circonscription de Deux-Montagnes à l’Assemblée législative du Québec.

 

En mars 1869, Henri-Gustave Joly de Lotbinière [futur 4e premier ministre du Québec] devient le premier chef de l’opposition officielle et Félix-Gabriel Marchand [futur 11e premier ministre du Québec] devient son lieutenant. Lionel Fortin raconte que « jusqu’à cette date, les libéraux s’étaient refusés à faire une opposition véritable au gouvernement surtout à cause de Marchand qui avait prôné la fin des luttes partisanes au sein de la Chambre. Mais avec le temps, les “rouges” comprirent qu’il fallait une opposition résolue afin de montrer une résistance énergique aux projets centralisateurs du gouvernement Chauveau et de combattre sans relâche ses tendances à soumettre l’action législative et administrative du gouvernement québécois à la domination fédérale. Dans ses fonctions de lieutenant, [Marchand] fut souvent appelé à remplacer son chef et à diriger les manœuvres de la “loyale opposition de Sa Majesté”. Il fit preuve à maintes occasions de ses qualités de stratège et de tacticien tout en étant mesuré, digne et poli. »

Marcel Hamelin avance qu'à cette époque, « les partis politiques n’ont pas de structures provinciales mais ressemblent à une coalition de noyaux régionaux. P-J.-O. Chauveau n’a paru sur aucune tribune électorale en dehors de la région de Québec, et il en est de même du chef de l’opposition. Ce même phénomène de régionalisme se reproduit au niveau des liens entre députés. Le parti ministériel ressemble à une structure féodale où les barons régionaux se placent au service d’un leader provincial ; les députés de Montréal sont naturellement plus près de Ouimet ou de Chapleau que de Chauveau; les députés ministériels anglophones montrent plus de loyauté envers Robertson ou Irvine qu’à l’endroit du premier ministre. Il en est de même chez les opposants où l’autorité de Joly demeure précaire. » 

Montréal vs Québec

La rivalité entre Québec et Montréal remonte bien avant l'arrivée Nordiques contre le club de hockey Les Canadiens. Gédéon Ouimet, un des lieutenants montréalais pour les conservateurs a joué à quelques reprises dans cette confrontation. Québec, quatre siècles d'une capitale rapporte un premier exemple. « À Québec, les spéculations sur les chances d'Ottawa de demeurer la capitale de la Confédération cessent rapidement. Montréal, la vieille rivale de Québec, autrefois déshonorée par l’incendie de son parlement, redonne vie à ses anciennes prétentions au titre de capitale. La rivalité entre Québec et Montréal fait depuis longtemps partie de l'histoire du Canada. En décembre 1869, le débat sur la construction de nouveaux édifices gouvernementaux à Québec en est un nouvel épisode. Tandis que l'opposition libérale dénonce la mesure pour des raisons financières, une rumeur se répand comme une traînée de poudre : deux députés conservateurs montréalais, Alexander Walker Ogilvie et Edward Brock Carter, s'apprêteraient à déposer une motion demandant le déplacement du siège du gouvernement de Québec vers Montréal. Ce bruit cause une commotion dans les milieux parlementaires ; plusieurs journaux reprennent la nouvelle, qui prend l'allure d’une conspiration montréalaise contre Québec. Les deux députés au cœur de cette affaire sont intimement liés aux grands milieux financiers et politiques montréalais. En Chambre, ils sont d'importants porte-parole de la région, dont ils parrainent la plupart des projets de loi. Alors que Cartier et Gédéon Ouimet sont les représentants des conservateurs francophones de Montréal à Québec, Ogilvie et Carter en sont le pendant anglophone. » Le gouvernement Chauveau tranche et Québec est et demeure la Capitale nationale. 

Québec, quatre siècles d'une capitale en ajoute : « Le 9 février 1875, l'opposition s'inquiète des dangers qui menacent les archives et les documents publics en raison du mauvais état des édifices. Le député libéral de Montmagny, François Langelier, déplore aussi que l'on veuille voter 100 000 $ sans disposer de plans des constructions projetées. Le trésorier Pierre Garneau, représentant de Québec-Comté, assure qu'ils sont en préparation et que le coût final des édifices sera de 250 000 $. Langelier critique également le fait que le palais de justice soit obligé de siéger à l'hôpital depuis deux ans et que l'on emploie des ouvriers montréalais pour rénover l'ancien Collège des Jésuites. Gédéon Ouimet, député ministériel de Deux-Montagnes, réplique qu'à cause de ces critiques continuelles, le gouvernement songerait à construire ces édifices « là où il n'aurait pas d'ennuis, et où le peuple serait heureux de les recevoir», c'est-à-dire à Montréal. La bombe est lancée : S'il y a tant de difficultés à s'arranger à Québec, dit Ouimet, nous serons obligés de demander qu’on transporte les bâtisses à Montréal, la conduite des députés justifierait cette démarche extrême. » C'est là une allusion à la controverse qui règne à Québec autour de la réfection de l'ancien Collège des Jésuites, projet qui traîne depuis 1871. Disant le regretter pour « la bonne vieille ville de Québec », Ouimet juge que l’attitude partisane de députés comme Langelier forcerait les ministres à agir de la sorte. Langelier répond que Ouimet, lui-même premier ministre en 1873-1874, n'a pas trouvé mieux à l'époque que de faire cadeau à Québec d'un «édifice rapiécé » pour abriter les départements. «Ces menaces en l'air, conclut Langelier, on sait parfaitement les apprécier à leur valeur à Québec. » »


LE DÉPUTÉ
 

Photographie de Gédéon Ouimet. 1875. Photographe : Studio of Inglis.

Bibliothèque et Archives nationales du Québec

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Portrait du premier ministre du Québec Pierre-Joseph-Olivier Chauveau.

Collection Dave Turcotte

Portrait du premier ministre du Québec Henri-Gustave Joly de Lotbinière.

Collection Dave Turcotte

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Portrait du premier ministre du Québec Félix-Gabriel Marchand.

Collection Dave Turcotte

Ministre

Le ministre

 Nommé Procureur général 

 

Le Dictionnaire biographique du Canada explique : « L’entrée en vigueur de la Confédération canadienne en 1867 marque un tournant décisif dans la carrière de Ouimet. Le 15 juillet, Pierre-Joseph-Olivier Chauveau, propulsé par Cartier et Hector-Louis Langevin au poste de premier ministre de la province de Québec à la place de Joseph-Édouard Cauchon, le nomme procureur général, même si Cartier fait des pressions pour qu’il désigne à cette fonction son associé François-Pierre Pominville. Ouimet a alors 44 ans. Il est financièrement à l’aise ; il jouit d’une grande réputation au sein du barreau de Montréal et de l’estime des conservateurs montréalais, au point que Cauchon avait songé, lui aussi, à lui confier ce poste. […] L’entourage de Ouimet le trouve “solennel”, grand travailleur devant l’Éternel, plus juriste qu’homme politique. »

 

Le Dictionnaire biographique du Canada précise que le « poste de procureur général, assumé traditionnellement par un premier ministre, est prestigieux. De concert avec le solliciteur, le procureur est le conseiller juridique du cabinet et il examine tous les projets de loi soumis à la Chambre. Il coordonne, de ce fait, les travaux du Conseil exécutif et dans son bureau se prépare la stratégie parlementaire. L’administration est réduite au minimum : trois fonctionnaires assistent le procureur et le solliciteur dans leur fonction. Le portefeuille qu’il détient confère à Ouimet de lourdes responsabilités, mais aussi une grande autorité dans la Chambre. Il est avec le premier ministre toujours sur la brèche. Il intervient dans la plupart des projets de loi et assure le bon fonctionnement de nombreux comités spéciaux. »

 

Le Dictionnaire biographique du Canada souligne que « durant la première législature, [Ouimet] attache son nom à deux réformes importantes. L’une préparée par un comité spécial dont il a été l’âme dirigeante donne à la province son premier Code municipal. Votée en 1870 et entrée en vigueur le 2 novembre 1871, la nouvelle loi maintient le principe de la double organisation : les corporations de comté et les corporations municipales. Elle a le mérite d’harmoniser nombre de lois et d’arrêtés, tout particulièrement les chartes de 11 villes et cités, sauf cependant celles de Montréal et de Québec. L’autre réforme concerne les magistrats de district ou magistrats rémunérés ; adoptée en 1869, elle complète la décentralisation judiciaire, diminue les frais d’administration dans les causes criminelles et tend à élever la compétence exigée des jurés pour mieux gérer la justice et mieux protéger la société. »

 

 Élection québécoise de 1871 

 

L’élection de 1871 se déroule en juin et juillet 1871 afin d’élire à l’Assemblée législative du Québec les députés de la 2e législature. Il s’agit de la 2e élection générale au Québec depuis la Confédération canadienne de 1867. Le Parti conservateur de Pierre-Joseph-Olivier Chauveau est réélu pour un second mandat, formant un gouvernement majoritaire.

 

Peu de choses semblent avoir changé depuis l’élection de 1867. La carte électorale est la même qu’auparavant et le double mandat (fédéral et provincial) est encore autorisé même s’il est controversé. John A. Macdonald est toujours premier ministre à Ottawa et Pierre-Joseph-Olivier Chauveau à Québec. George-Étienne Cartier est le lieutenant du Parti conservateur au Québec.

 

L’achat des vastes terres de la Compagnie de la Baie d’Hudson par le Canada rencontre une forte opposition au Québec, car la dette publique est en augmentation constante. Le partage de cette dette entre l’Ontario et le Québec est une source de tension, tout comme la question des écoles. Les protestants du Québec bénéficient de nombreux avantages que les catholiques des autres provinces ne possèdent pas. L’émigration massive de francophones vers les industries de la Nouvelle-Angleterre est toujours importante et suscite des débats réguliers. Enfin, des conservateurs catholiques de droite cherchent à faire élire des candidats favorables au Programme catholique ultramontain prôné par les évêques Laflèche et Bourget, mais ils ne rencontrent que peu de succès.

 

Le Dictionnaire bibliographique du Canada continue : « La Chambre issue des élections de 1871 est plus expérimentée et plus combative que la précédente, mais la majorité conservatrice y est plus divisée. Les libéraux s’en prennent au favoritisme gouvernemental et à l’administration des terres de la couronne. Les scissions s’accroissent chez les conservateurs : les Montréalais et les programmistes réclament une meilleure représentation dans le cabinet. La question universitaire et la question des registres d’état civil, qui opposent Mgr Ignace Bourget et les jésuites aux sulpiciens et à plusieurs évêques, divisent le cabinet : Ouimet prend en apparence parti pour Mgr Bourget, mais manœuvre pour ne pas s’aliéner ses adversaires. »

Résultats de l'élection québécoise de 1871 dans la circonscription de Deux-Montagnes.

Musée virtuel d'histoire politique du Québec


LE MINISTRE
 

Illustration des membres du cabinet Chauveau, des conseillers législatifs et des députés. Assemblée législative du Québec. 1869.

Collection Alain Lavigne

Illustration de Joseph-Édouard Cauchon, homme politique québécois, d'après une photographie de W. J. Topley. John B. Magurn Publisher.  

Collection Dave Turcotte

Illustration de George-Étienne Cartier, homme politique québécois, d'après une photographie de W. J. Topley. John B. Magurn Publisher.   

Collection Dave Turcotte

Premierministre

Le premier ministre

En 1873, le premier ministre Pierre-Joseph-Olivier Chauveau fait face à des factions au sein de son gouvernement. Endetté et surchargé, il démissionne. La démission du premier premier ministre du Québec ouvre la voie à un remaniement ministériel. Les organisateurs conservateurs de Montréal réclament qu’un des leurs remplace Chauveau. Les militants suggèrent Charles-Joseph Coursol, un juge bien vu des anglophones, tandis que les députés préfèrent un représentant de la vieille garde conservatrice. Membre du cabinet Chauveau à titre de Procureur général depuis 1867, Ouimet devient le successeur tout désigné.

 Nommé premier ministre du Québec 

 

Le 27 février 1873, Gédéon Ouimet est assermenté premier ministre du Québec, ministre de l’Instruction publique, Secrétaire et Registraire provincial. Tout comme se fut le cas pour le conseil des ministres de Chauveau, ce sont les leaders fédéraux qui détermine la composition du gouvernement Ouimet. 

 

 Cabinet de Gédéon Ouimet, 2e premier ministre du Québec, le 27 février 1873: 

 

Gédéon Ouimet : Premier ministre, président du Conseil exécutif, Instruction publique, Secrétaire et Registraire

Louis Archambeault (conseiller législatif) : Agriculture et Travaux publics

Joseph-Adolphe Chapleau  : Solliciteur général

Pierre Fortin : Terres de la Couronne

George IrvineProcureur général

Joseph Gibb Robertson  : Trésorier

John Jones Ross : Président du Conseil législatif

Le Dictionnaire biographique du Canada présente ainsi le cabinet Ouimet : « Ouimet qui, comme son devancier, sera tout à la fois registraire, secrétaire, ministre de l’Instruction publique et premier ministre. Joseph Gibb Robertson demeure au Trésor et Louis Archambeault, à l’Agriculture et aux Travaux publics. George Irvine est hissé au rang de procureur général. Trois nouvelles figures accèdent au cabinet : Pierre-Étienne Fortin, député de Gaspé qui, en tant que commandant de la Canadienne, s’était intéressé aux ressources naturelles, devient commissaire des Terres de la couronne ; John Jones Ross [futur premier ministre du Québec], conseiller législatif de la division de Shawinigan et farouche opposant des ultramontains, accède à la présidence du Conseil législatif. Chapleau, qui incarne, au dire de Clément-Arthur Dansereau, “la jeunesse et tout le monde remuant qui exerce l’influence en temps d’élection”, est nommé solliciteur. Ce cabinet représente bien les régions, fort mal cependant les anglophones et les circonscriptions urbaines de Montréal. Ouimet aurait aimé y inclure Trudel, leader ultramontain, fût-ce en sacrifiant son jeune ami Chapleau, mais Langevin et le journal conservateur la Minerve s’y sont opposés. Ce cabinet consacre aussi la rupture entre les ultramontains et les bleus bon teint. »

Marcel Hamelin ajoute : « Comme le précédent, le cabinet Ouimet ne comprend cependant pas un véritable porte-parole des circonscriptions urbaines de Montréal, en particulier des milieux financiers et anglophones de la métropole. Pour renforcer la représentation de Montréal, Chapleau et Dansereau ont suggéré d'inclure Coursol [qui avait été présenti pour succèder à Chauveau] comme remplaçant d’Archambault ou comme ministre additionnel : «Il est certain que Ouimet et Chapleau, seuls, se feront massacrer dans notre District. Coursol a seul le prestige de position sociale qui puisse servir de base au talent de Chapleau et donner quelque valeur pratique à la dignité de Ouimet. Ainsi, tandis que Ouimet groupera autour de lui le vieux noyau des conservateurs qui ne doutent de rien, Coursol ralliera la finance et les Anglais ; [...] et Chapleau la jeunesse et tout le monde remuant qui exerce l’influence en temps d’élections.»  La suggestion soulève cependant une foule d’objections : Coursol n’accepterait pas de servir sous Ouimet en occupant un poste inférieur dans le cabinet. D’autre part, évincer Archambault affaiblirait l'organisation électorale conservatrice sur la rive nord. Enfin, créer un poste additionnel serait procurer un argument à l’opposition qui prône une politique d’économies et de « retranchements ». » 

 

Gouvernement Ouimet

Gédéon Ouimet, deuxième premier ministre du Québec, prévoit poursuivre la politique de son prédécesseur axée sur l’équilibre du budget, la colonisation et l’immigration, freiner l'exode et rapatrié les Canadiens-français exilés aux États-Unis, ainsi qu’un développement ferroviaire prudent et proportionnel aux revenus de la province. C’est d’ailleurs son gouvernement qui contracte le premier emprunt majeur du Québec à l’étranger pour soutenir le développement ferroviaire. C’est pour répondre aux besoins de la révolution industrielle qu’il soutient en outre la création de l’École polytechnique de Montréal, en 1873. Ouimet travaille personnellement à la mise sur pied de l’établissement. Les premiers étudiants, au nombre de sept, y sont admis dès le mois de janvier 1874. Reconnu officiellement par le gouvernement québécois trois ans plus tard, cet établissement reçoit alors le nom d’École Polytechnique de Montréal. Il s’agit de la première école francophone d’ingénieurs en Amérique.

 

Wikipédia met en lumière que « c’est le gouvernement de Gédéon Ouimet qui abolit le double mandat, permettant à un candidat de se faire élire à la fois au fédéral et au provincial. Bien que s’étant personnellement opposé à cette partie de la loi, craignant un affaiblissement du gouvernement québécois, le premier ministre avait laissé ses députés libres de voter selon leurs convictions. Cette même loi visait en outre à contrer la fraude électorale. »

 

Wikipédia affirme que « c’est sous le gouvernement de Gédéon Ouimet qu’au printemps de 1874, on envisage la construction d’un nouvel Hôtel du Parlement, projet qui verra l’érection de l’Assemblée nationale du Québec telle qu’on la connaît. Le site de l’ancien Collège des Jésuites, où se trouve l’actuel Hôtel de Ville de Québec, est d’abord envisagé, mais, en juin, le gouvernement suggère plutôt d’ériger le nouvel édifice sur le site du Cricket Field, terrain qui sera effectivement retenu par le successeur de Ouimet, Charles-Eugène Boucher de Boucherville, en 1876. »

 

Le Dictionnaire biographique du Canada raconte qu’au : « cours de l’été de 1873, l’annonce du montant que le gouvernement fédéral allait assumer comme dette de l’ancienne province du Canada, soit 73 006 088 $ change radicalement le programme du gouvernement provincial. Le Québec, dont la cote de crédit est à la hausse, peut se permettre d’emprunter. Le 13 janvier 1874, le discours du budget énonce les éléments d’une nouvelle politique ferroviaire. Le gouvernement établit des priorités, renonce à concéder des terres aux compagnies ferroviaires pour ne pas nuire au mouvement de colonisation, mais leur accorde une subvention de 2 500 $ par mille. Rangées dans une catégorie à part, la Compagnie du chemin de fer de la rive nord et la Compagnie du chemin à lisses de colonisation du nord de Montréal se répartiront un prêt, sous forme d’obligations, de 2 millions de dollars portant intérêt à 5 %. Le gouvernement projette d’investir plus de 5 millions de dollars dans la construction ferroviaire. »

 

Cependant, le cabinet Ouimet ne parvient pas à obtenir les bénéfices politiques de cette politique audacieuse et longtemps espérée puisque…

 

Scandale des Tanneries

Réal Bélanger, Richard Jones et Marc Vallières décrivent le scandale des Tanneries dans Les grands débats parlementaires 1792-1992 de cette façon : « Dans la politique québécoise des années 1870, plusieurs factions et groupes régionaux d’intérêts s’affrontent à l’intérieur du Parti conservateur, au pouvoir depuis la Confédération. Au cours de l’été 1874, le cabinet du premier ministre Gédéon Ouimet se retrouve impliqué dans une affaire de spéculation foncière à Montréal sur une propriété du gouvernement qu’il échange contre une autre afin d’y installer des hôpitaux montréalais protestants et catholiques pour les contagieux. Deux spéculateurs, le courtier John Rollo Middlemiss et le journaliste conservateur Arthur Dansereau, parviennent à convaincre des membres du cabinet et le premier ministre de conclure l’échange très rapidement. »

 

Dans le but de mieux comprend cette affaire voici un long extrait du livre Les Premières années du parlementarisme québécois de Marcel Hamelin. « L’affaire des Tanneries s’inscrit dans le mouvement de spéculations foncières étourdissantes qui se pratiquent à Montréal et ses environs dans la deuxième partie du XIXe siècle ; ces spéculations sont à l’origine de nombreuses fortunes de familles montréalaises. Cette histoire demeure cependant très nébuleuse, en dépit des enquêtes qu’elle a provoquées. [...] Dans le but d'y construire un asile d’aliénés, le gouvernement du Bas-Canada, en 1839, acheta des religieuses de l’Hôtel-Dieu de Montréal un terrain d’environ 25 arpents situé à la côte Saint-Antoine, au village des Tanneries, dans la circonscription d’Hochelaga. Le gouvernement ne mit cependant pas son projet à exécution et, lors de la Confédération, ce terrain devint la propriété de la province. Le village des Tanneries connut un essor considérable et la propriété du gouvernement intéressa plus d'un spéculateur. Au début de 1874, A. T. Galt offrit 40 000 $ pour ce terrain. De pareilles offres furent mises de l’avant par M.-C, Mallarky, J. W. McGauvran, député de Montréal-Centre depuis 1874, et Arthur Dansereau, rédacteur-propriétaire de la Minerve. Le gouvernement répondit à ces personnes qu’il n’était pas «préparé à se départir de ce terrain par vente».

 

À ce moment-là, l'Hôpital Général de Montréal se plaignait de l'exiguïté de ses locaux et songeait à construire un nouvel hôpital. Le 16 février 1874, les directeurs de cette institution protestante envoyèrent à Québec une délégation officielle afin d'obtenir du gouvernement le terrain des Tanneries. En mars, Théodore Hart, William Lunn, Henry Judah et Charles John Brydges, introduits par Irvine, plaidèrent leur cause devant le cabinet. Les directeurs de l’hôpital n’avaient cependant pas encore précisé leur projet et c’est en termes assez vagues qu’ils présentèrent aux ministres les besoins de leur institution et exprimèrent leur intention de construire un hôpital pour les convalescents ou les patients souffrant de maladies contagieuses, en particulier les variolés. Le cabinet se montra sympathique à la demande des syndics mais quelques ministres émirent l’opinion qu’il serait malvenu d’accorder cette faveur aux protestants sans prévoir une aide semblable aux catholiques ; d’autres s’inquiétaient de la réaction des habitants des Tanneries à la construction d’un hôpital pour malades contagieux. Le cabinet ajourna sa décision.  

Vers le 10 juin 1874, John Rollo Middlemiss, un courtier bien connu à Montréal, entra en contact avec Arthur Dansereau afin d'obtenir des renseignements au sujet de la propriété des Tanneries. Aux aguets de tout ce qui se passait à Montréal dans le domaine des spéculations foncières, Middlemiss connaissait l’intérêt que portait Dansereau à ce terrain; ses fonctions de rédacteur de la Minerve et son amitié avec Chapleau permettaient à Dansereau de sonder les intentions du cabinet et de servir d’intermédiaire entre les ministres et un syndicat financier. Effectivement, Dansereau expliqua à Middlemiss les hésitations du gouvernement. Deux jours plus tard, Middlemiss revint à la charge, exposant à Dansereau le plan qu'il avait conçu: proposer au ministère d'échanger le terrain des Tanneries pour une quarantaine d'arpents de la ferme Leduc située au coteau Saint-Pierre, à l’angle du chemin d’en haut de Lachine et du chemin de la côte Saint-Luc ; les ministres pourraient ainsi favoriser la construction de deux hôpitaux, l’un catholique et l’autre protestant. Middlemiss demanda à Dansereau de l’introduire auprès de ministres afin de leur proposer un tel marché. 

À partir de ce moment-là, Dansereau déploie une activité fébrile, rencontrant Middlemiss plusieurs fois par jour et s'employant à convaincre les trois ministres de la région de Montréal, Chapleau, Archambault et Ouimet, des avantages de l’échange. Le 18 juin, il fait visiter par le premier ministre les deux terrains en cause. Le 22, c’est Archambault, ministre des Travaux publics et donc responsable de cette propriété de la Couronne, qui examine la ferme Leduc en compagnie de Middlemiss et de Dansereau : ne serait-il pas préférable de construire des hôpitaux pour variolés dans un endroit salubre et surtout plus isolé? Ouimet se laisse convaincre très facilement. Le 23, il écrit à Irvine, à Québec : «J’ai été visiter notre terrain des Tanneries, celui que MM. de l’hôpital nous ont demandé pour y ériger un hôpital des picotés. Je trouve qu’il est impossible d’y mettre un hôpital là, car ça se trouve en plein monde. Il y a au pied du terrain tout le village de St-Henri ; de chaque côté du terrain, il y a des maisons qui, nécessairement habitées comme elles sont, s'opposeraient à un semblable voisinage. On nous propose de faire un échange de ce terrain, qui n’a que vingt arpents, pour un autre qui se trouve à un demi mille plus loin, dans une belle position. On nous donnera quarante arpents pour nos vingt. J'ai visité ce terrain; je le trouve superbe, et il aura autant de valeur que le nôtre. Si nous faisons l'échange, nous pouvons donner à l’hôpital anglais 10 ou 12 arpents; à une autre institution, une même quantité de terrain, et, ainsi, nous pouvons satisfaire deux institutions au lieu d’une. Archambault et Chapleau sont en faveur de l'échange, et je vous prie de me laisser savoir, par un télégramme, demain, si vous y avez aucune objection. Si vous n’objectez pas, je ferai un rapport en conséquence.» 

Irvine ne formule aucune objection au principe de l’échange mais suggère au premier ministre d’obtenir auparavant l’accord des représentants de l’Hôpital Général de Montréal. [...] Par le même courrier, le procureur général demande à Hart de voir le premier ministre pour discuter de l’affaire. Le 25, Ouimet rencontre Judah et Hart et leur demande ce qu’ils pensent de la ferme Leduc. On sait que le premier s’oppose vivement à l’échange à cause de l’éloignement de la ferme Leduc, mais il est impossible d’établir la teneur de la conversation entre Ouimet et Hart, à cause des témoignages contradictoires recueillis au cours de l’enquête officielle Le 26, tous les ministres assistent à une réunion du cabinet, sauf Robertson qui est en Angleterre. Ouimet et Archambault expliquent le projet d’échange et, le lendemain, un arrêté ministériel confie au commissaire des Travaux publics le soin de mener les négociations avec le propriétaire de la ferme Leduc. Middlemiss et Archambault concluent l’entente le 1er juillet 1874.

 

Les représentants de l'Hôpital Général n'abandonnent pas la partie. Le 3 juillet, Hart fait parvenir à Irvine une lettre désapprouvant en termes violents la transaction qu’il appelle «un job». Surpris, Irvine consulte Fortin et télégraphie à Archambault et à Ouimet de ne point conclure l’échange avant d’obtenir de plus amples renseignements. L’arrêté ministériel n ’ayant pas reçu la sanction formelle du lieutenant-gouverneur, il ne pense pas que l’affaire est déjà bâclée. Une fois de retour dans la capitale, le premier ministre réussit cependant à apaiser les craintes du procureur général. Mais à Montréal, la tempête ne fait que commencer, les syndics de l’hôpital ameutant les cercles anglophones. La Montreal Gazette et le Herald publient des insinuations défavorables au ministère, puis des accusations très nettes: selon le Herald, on ne peut expliquer la transaction qu’en supposant aux ministres de Québec une nullité incroyable ou une perversité profonde. Peu à peu, les journaux francophones, en particulier le National, le Bien Public, l'Événement, le Journal de Québec et le Nouveau Monde, emboîtent le pas.  

Plusieurs circonstances contribuent à éveiller les soupçons au sujet de l’échange. D’abord, rien ne semble justifier la hâte « indécente» des deux parties d’en venir à une entente: le ministre Archambault signe l’échange le 1er juillet bien que le lieutenant-gouverneur n’a pas encore officiellement ratifié l’arrêté ministériel du 27 juin. Quoique les ministres veuillent acquérir la ferme Leduc pour répondre aux besoins de l'Hôpital Général, ils n’en consultent pas les directeurs, se contentant de contacts officieux avec deux syndics. En dépit des objections catégoriques de l'un de ces derniers, Ouimet et Archambault décident de procéder à l'échange, sans consulter davantage. Les témoignages ultérieurs de plusieurs médecins et directeurs de l'hôpital montreront que l'éloignement de la ferme Leduc n’était pas leur seule raison de refuser ce terrain ; ils évoqueront également les difficultés de drainage du terrain, le coût excessif de l'installation du gaz et des conduites d’eau, et l’absence de transport en commun dans les environs. 

Il faut dire, cependant, que les ministres ne connaissaient pas tous les éléments de l’affaire lorsqu’ils adoptèrent l’arrêté ministériel du 27 juin. Ainsi, Ouimet a écrit à Irvine que la distance entre les deux terrains était d’environ un demi-mille alors qu’elle était, en fait, de plus d'un mille et demi. Irvine, Fortin et Ross croyaient que les directeurs de l'hôpital se montraient satisfaits de la ferme Leduc, mais on les avait à peine consultés et les objections très nettes formulées par Judah n'avaient pas été présentées au cabinet. 

Middlemiss et Dansereau ont assuré les ministres de la valeur à peu près identique des deux propriétés; très tôt, cependant, plusieurs experts évalueront le terrain des Tanneries à plus de 200 000 $, et la totalité de la ferme Leduc à moins de 40 000 $. Or, le gouvernement n'a reçu que la moitié de cette ferme en retour du terrain des Tanneries. De leur propre aveu, Ouimet et Archambault ne connaissaient pas la valeur des propriétés dans Montréal et le premier ministre a montré au moins beaucoup de naïveté en ne consultant pas davantage les spéculateurs avertis de la ville. 

Mais la transaction prend l’allure d’un scandale lorsque l’examen des titres de la ferme Leduc révèle comment Middlemiss en était devenu le propriétaire. Le 19 mars 1874, les frères Leduc vendaient à Walter R. Rice, un courtier, une partie de leur ferme pour la somme de 16 000 $ ; le 1er avril, Rice signait une promesse d’achat du reste de la propriété qu’il obtenait pour 22 000 $ ; cette vente fut complétée le 30 juin. Rice avait donc versé 38 000 $ pour ce terrain d’environ 80 arpents. Lorsque Middlemiss négociait l’échange avec les ministres, il n’était pas encore propriétaire de la ferme Leduc : ce n’est que le 30 juin qu’il l'acheta de Rice pour la somme de 163 000 $. Comment expliquer une telle augmentation de la valeur de la propriété en si peu de mois? N’avait-on pas voulu tromper le gouvernement en donnant une valeur fictive à la ferme Leduc? Comment expliquer que le ministre Archambault, un notaire de longue expérience, n’ait pas étudié les titres de la propriété et découvert la différence flagrante de la valeur de la ferme Leduc entre mars et juillet 1874? Comment expliquer que le ministre des Travaux publics, contrairement aux coutumes bien établies, ait procédé à l’échange sans faire examiner les titres de la propriété par les « conseillers en loi » de la Couronne, en particulier par le procureur général? Voulait-il soustraire certains renseignements à ses collègues?

 

De toute façon, à la fin de juillet, le Bien Public, rédigé par L.-O. David et Cléophas Beausoleil, lance une nouvelle bombe politique : Dansereau a déposé à son crédit, à la Banque Jacques-Cartier, quelques jours après l’échange, une somme de 65 000 $ dont 48 000 $ provenaient de deux chèques de Middlemiss : «Nous déclarons que ces 65 000 $ étaient la part que M. Dansereau devait avoir pour lui personnellement et pour quelques amis, s’il parvenait à décider le gouvernement à faire l’échange de la propriété des Tanneries contre la terre Leduc».

 

Dansereau s’empresse de publier une lettre explicative dans la Minerve, affirmant qu’il s’agissait tout simplement d’un prêt consenti par Middlemiss et pour lequel il avait fourni les garanties les plus sûres et payait un intérêt de 8 pour cent. «Cet emprunt est mon affaire personnelle, et rien de ce montant n’est de loin ou de près de l’argent public». On apprend également que Middlemiss a déposé à la Banque Jacques-Cartier, au nom de Louis Archambault, la somme de 50 000 $, « comme précaution, comme garantie pour rencontrer toute hypothèque, s’il y en avait eu contre le terrain échangé». Outre qu’il paraît étrange qu’Archambault, un notaire, n’ait pu s’assurer avant l’échange de la teneur exacte des titres de propriété de Middlemiss, il est étonnant que le versement de cette garantie ait été fait au nom de L. Archambault, plutôt qu’au trésorier. Plusieurs imaginent que cette somme constitue un fonds d’élection pour la région de Montréal. 

 

L’indignation soulevée par la presse se manifeste dans des assemblées publiques. Deux assemblées tenues à Montréal donnent le ton à celles qui sont organisées dans les différents coins de la province. La première a lieu aux Tanneries, le 21 juillet, alors que L.-O. David, F.-G. Marchand et François Langelier comparent l’échange des terrains au scandale du Pacifique. Louis Beaubien, embarrassé par la transaction, condamne le principe de l’échange et se dit étonné de n’avoir pas été consulté par les ministres sur une question qui concernait aussi directement sa circonscription. À la demande du premier ministre, Chapleau affronte les accusateurs, nie toute tentative de corruption et insiste sur les avantages que présente la ferme Leduc pour la construction d’un hôpital pour contagieux. Frondeur, il invite la population des Tanneries à se réjouir de l’action du gouvernement: «Heureusement, les choses ont tourné d’une autre façon. Sur le terrain dont l’on parle tant depuis quelques jours, s’élèveront de splendides villas, qui donneront un aspect plus riant à votre localité déjà si belle. L’érection de ces riches bâtisses contribuera aussi grandement à faire progresser votre village. Nous donnerons aux hôpitaux un terrain plus éloigné, et nous laisserons aux Tanneries son terrain pour y construire des villas».

 

[...]

 

Le procureur général se trouve lié d’une façon spéciale à la transaction des Tanneries. Au cours de la session précédente, plusieurs députés anglophones l'ont officiellement reconnu comme leader de la minorité en Chambre ; c’est à lui que les syndics de l’Hôpital Général se sont adressés pour obtenir du gouvernement le terrain des Tanneries; c’est également à lui qu’à la fin de juin et au début de juillet, Hart et Judah ont exprimé leurs objections au sujet de la ferme Leduc. À la fin de juillet, à la demande de quelques amis de la métropole, il se rend à Montréal visiter les terrains en cause et étudier les documents relatifs à l’échange. Le 30, il se retire du ministère, écrivant au premier ministre que quelques collègues semblent lui avoir caché plusieurs renseignements: «J'ai aussi constaté l’existence de plusieurs circonstances qui doivent avoir été connues de quelques-uns de mes collègues et que, si je les eusse connues, j’aurais considérées comme une raison suffisante pour me porter à ne pas consentir à la transaction » 

 

J. J. Ross imite le geste d’Irvine, le 7 août. Quant à Pierre Fortin, il remet lui aussi sa démission mais, à la demande de Ouimet, il accepte de la retarder jusqu'au retour de Robertson afin de permettre au ministère d’approuver le plus tôt possible les émissions d’obligations que le trésorier vient de négocier en Angleterre. Au mois d'août 1874, le premier ministre Ouimet envisage trois réactions possibles à la démission de ses collègues. Il peut d’abord essayer de reconstituer le ministère en remplaçant les démissionnaires; mais à cause de l’hostilité du milieu anglophone, cela signifie probablement rebâtir le cabinet sans représentant de la minorité. [...] 

Une suggestion plus réaliste consiste à désavouer publiquement les deux ministres les plus directement compromis par l’échange : Archambault qui a mené les négociations, et Chapleau, l'associé de Dansereau. Le Nouveau Monde et l'évêque de Montréal conseillent une telle solution. Pendant son année au pouvoir, Ouimet s’est acquis la confiance de Mgr Bourget en encourageant une école de réforme tenue par les frères de Saint-Vincent-de-Paul, en négociant avec les sœurs de l’Asile de la Providence un contrat en vue d’assurer le soin des aliénés dans le district de Montréal et, surtout, en préparant une nouvelle loi scolaire. Le remplacement de Chapleau et d’Archambault par des hommes de la trempe de Gendron, Beaubien, Bellerose ou Trudel ne pourrait que réjouir l’évêque de Montréal. D’autant plus qu’en 1874, les ultramontains sont inquiets de la victoire des libéraux à Ottawa et souhaitent ardemment l’union des conservateurs. [...]

Cette solution est la seule planche de salut de Ouimet : il serait facile de recruter deux nouveaux ministres, prenant soin de choisir au moins une personnalité respectée des anglophones de Montréal. Vue à la lumière de l'affaire des Tanneries, une remarque de Dansereau à Langevin en 1873 apparaît comme une véritable prédiction : «Ouimet et Chapleau, seuls, se feront massacrer dans notre District», a-t-il écrit, suggérant d'inclure dans le cabinet un homme qui rallierait « la finance». L’affaire des Tanneries connaîtrait probablement une tout autre tournure, si le cabinet avait joui de plus de considération de la part des milieux financiers. Mais Ouimet n'est pas homme à prendre une décision aussi odieuse. Il entretient de véritables liens d’amitié avec Archambault et a pour Chapleau, son ancien élève, une confiance un peu naïve. Il lui en coûte également de reconnaître que la transaction, dont il est en partie responsable, mérite la censure publique.

 

Ouimet décide alors de suivre une autre voie : il demeurera à son poste jusqu’au retour de Robertson et confiera à ce dernier le soin d’examiner la transaction des Tanneries et, partant, de juger le cabinet. Aussitôt rentré d’Europe, le trésorier visite en effet les deux terrains, examine les documents, rencontre des hommes de confiance de Montréal puis remet sa démission le 7 septembre 1874. Le ministère Ouimet a vécu. 

 

La démission d’Irvine et celle de Ross ont condamné le ministère de façon à peu près irrémédiable et Ouimet, au début d’août, est un homme complètement découragé. Dès lors, sa principale préoccupation consiste à éviter l'avènement de Joly au pouvoir et à former le cabinet conservateur le moins préjugé possible à l’égard de la transaction des Tanneries. Il est convaincu qu’une enquête menée par une commission royale ou par un comité de la Chambre va exonérer son cabinet de tout blâme. 

[...]

[Les ténors conservateurs] proposent de confier la direction du cabinet à J.-G, Blanchet, l’Orateur de la Chambre. Tenant compte cependant des risques que comporte une élection dans Lévis, où Blanchet a difficilement remporté la victoire en 1871 et a subi une défaite aux élections fédérales de 1874, ils se montrent également disposés à servir sous Boucherville. Irvine, Robertson, Ross, Fortin, Joseph Coursol et Henry Starnes devraient constituer le cabinet. Ouimet reçoit cette proposition comme une gifle. Non seulement lui demande-t-on de démissionner et de réintégrer dans leurs fonctions ceux qui l’ont abandonné, mais on lui suggère la candidature de Starnes qui la publiquement conspué à l’assemblée du carré de Chaboillez ! Quelle sympathie peut-il attendre d’une telle équipe? La candidature de Boucherville au poste de premier ministre obtient assez facilement l’appui de tous les éléments conservateurs. De sympathie ultramontaine, il a toujours évité les écarts de langage. Au Conseil législatif, on admire sa sagesse et sa modération. En dépit de son éviction du cabinet en 1873, il promet à Ouimet une enquête impartiale. D’autre part, les adversaires des « tanneurs » acceptent de collaborer avec lui si les autres membres du cabinet leur conviennent. Boucherville est donc l’homme du compromis; Langevin le décrit à Macdonald comme «a man man of the world, a gentleman, a well educated man, respectable and respected». C’est pourtant un homme froid, austère et hautain. À l’aise au Conseil législatif, les bains de foule lui font peur. Lorsque Ouimet remet sa démission le 8 septembre, le lieutenant-gouverneur fait immédiatement appel à Boucherville. Au milieu des rumeurs d’élections précipitées, la formation du nouveau ministère s’avère une tâche très ardue. Ce n’est que le 21 septembre que Boucherville peut présenter au lieutenant-gouverneur son cabinet. » 

Réal Bélanger, Richard Jones et Marc Vallières reprennent : « À l’exception de Robertson, aucun des anciens ministres n’en fait partie. Ce nouveau ministère doit affronter la Chambre à la fin de 1874, dans un débat autour d’une enquête devant faire la lumière sur les dessous de l’affaire. Ouimet et ses anciens collègues, démissionnaires ou non, tentent de justifier leurs positions respectives. »

Lucie Desrochers souligne que pour le chef de l'opposition libérale Joly de Lotbinière, « le gouvernement Boucherville n’est que l’ancien Gouvernement Ouimet habillé en neuf ; il ne fait que tenir chaudes les places occupées naguère par Ouimet, Chapleau et Archambault, les trois ministres démissionnaires. S’ils n'avaient pas été coupables de quelque chose, pourquoi auraient-ils donc démissionné?, se demande-t-il. » 

Marcel Hamelin précise que «  Les députés demandent au comité de procéder à l’enquête avec la plus grande diligence possible et de leur faire rapport avant la dissolution des Chambres. Les enquêteurs mettent donc tout en œuvre pour hâter leur travail : ils se réunissent même pendant la période des Fêtes et tiennent la plupart de leurs séances à Montréal où se trouvent la majorité des témoins. Pendant les deux mois de leur enquête, ils interrogent plus de 140 témoins. Et le 20 février 1875, le comité présente son rapport final. Les cinq enquêteurs reconnaissent que la propriété des Tanneries valait «de soixante à cent mille piastres de plus que la partie de la ferme Leduc qui a été cédée par contrat à la province de Québec»; ils établissent aussi que Dansereau s’est «servi de son influence auprès des ministres pour les amener à consentir à cet échange, avec John Rollo Middlemiss, au bénéfice personnel de Middlemiss et de Dansereau, et au détriment de la province». Concernant le prétendu prêt de 48 000 $ que Middlemiss aurait consenti à Dansereau au lendemain de la signature du contrat, le comité affirme ne pas croire «que la transaction soit telle que représentée par eux». Enfin, le rapport recommande d’engager immédiatement des poursuites pour faire annuler l’échange Le 20 avril 1875, le procureur général de la province intente des poursuites contre Middlemiss, alléguant en particulier le fait que l’échange a été obtenu en vertu de «représentations frauduleuses et d’intrigues ». Le procureur réclame l’annulation du contrat du 1er juillet 1874 et demande «que Sa Majesté soit réintégrée dans tout ce qu’elle a perdu dans cette affaire, le tout avec dépens contre John Rollo Middlemisss». La Cour ne rendra son jugement qu’après les élections provinciales de 1875. »

 

Marcel Hamelin conclut : « Middlemiss et Dansereau ont été, à coup sûr, les véritables architectes de l'affaire. Mais nous ne pouvons disculper Archambault, le ministre responsable de l’échange : c'est lui qui présente le marché au cabinet, qui met tout en œuvre pour convaincre Ouimet et hâter les procédures, qui étudie les titres de propriété, pourtant si révélateurs, et qui négocie finalement l’échange. Aucun document ne nous permet d'impliquer Chapleau dans la machination, mais comment peut-il ignorer les agissements et les intentions de Dansereau, son compère? Quant à Ouimet, le ton de sa correspondance, particulièrement avec Archambault, nous amène à lui accorder le bénéfice du doute, bien qu'il ait fait preuve dans cette affaire au moins d'une naïveté et d'une insouciance déconcertantes chez un premier ministre. Quels que soient les véritables coupables, l’échange des propriétés est un acte évident de corruption, tramé à l’avantage de quelques spéculateurs, de la Minerve et de la caisse électorale conservatrice de la région de Montréal. Encore là, le scandale des Tanneries n’est qu’un cas parmi tant d’autres, qui montre comment la gestion des affaires publiques sert à assouvir l'appétit de quelques individus et surtout à alimenter la caisse et la presse d’un parti. »

Photographie du village des Tanneries. 1859.

Archives de la ville de Montréal

 Élection québécoise de 1875 

 

Ouimet n’est pas sans appuis. Ses électeurs et des membres du clergé lui gardent leur confiance. Aux élections générales de 1875, il est réélu sans opposition dans Deux-Montagnes dans une élection où le contexte, expliqué par Wikipédia, est qu’à : « Ottawa, le scandale du Pacifique a fait chuter le gouvernement fédéral libéral-conservateur de John A. Macdonald et placé au pouvoir les libéraux d’Alexander Mackenzie. George-Étienne Cartier, dont la santé déclinait depuis quelques années, est décédé en 1873. Pierre-Joseph-Olivier Chauveau avait démissionné comme premier ministre en 1873 pour continuer sa carrière à Ottawa. Situation inhabituelle, le premier ministre lors de l’élection, Boucher de Boucherville, n’est pas député, mais conseiller législatif. Henri-Gustave Joly de Lotbinière est toujours à la tête du Parti libéral du Québec. Les libéraux arrivent mal à se démarquer du libéralisme catholique, condamné par l’Église, ce qui contribue à la victoire des conservateurs. Le découpage des circonscriptions est le même que lors de l’élection précédente. Cependant, une nouvelle loi électorale est entrée en vigueur en février 1875 : le vote doit désormais se faire au scrutin secret, et doit se tenir en une seule journée à travers toute la province. La loi tente également de réduire la fraude électorale ainsi que les violences lors des campagnes électorales. »

 

Première élection depuis l'interdiction du double mandat, elle est la première à se tenir par vote secret au Québec. Au fédéral, le premier vote secret a lieu en 1878. Elle se tient pour la première fois à la même date partout au Québec. Elle est aussi la première élection à se tenir avec un certain contrôle des dépenses électorales. Marcel Hamelin rapporte que « Chapleau et Ouimet, principaux défenseurs du scrutin public, déclarent que ceux qui méritent de voter ne doivent pas rougir de leurs opinion politiques. Le scrutin secret, prétendent-ils, introduit d’autres formes de corruption électorale puisqu'un électeur peut voter plus d’une fois sous des noms d’emprunt ou vendre son vote à plusieurs candidats. » 

Jacques Lacoursière spécifie que « pour une des premières fois, une journée d’élections n’est pas marquée par le désordre, des bagarres ou des morts. « La nouvelle loi a fonctionné à perfection, peut-on lire dans l'Événement du 8 [juillet 1875]. Dans cette ville [Québec] si souvent ensanglantée par des émeutes électorales, il n’y a pas eu une seule scène de désordre à déplorer. Tout s’est passé comme dans un corps délibérant bien organisé. Aussi, à la fin de la journée, les bons citoyens se félicitaient-ils sur l’immense progrès moral accompli. »

Les conservateurs font élire 43 des 65 députés de l’Assemblée législative. Le premier ministre conservateur Charles-Eugène Boucher de Boucherville est donc reporté au pouvoir.

 

Ouimet blanchit

Le 30 octobre, le juge Francis Godschall Johnson a examiné l’affaire des Tanneries et n’a trouvé aucune preuve de conspiration ou de fraude. Selon Ouimet, cette décision prouve que son gouvernement est « sans tache » et qu’il peut « porter la tête haute ». Gilles Boileau souligne qu'au « cours des 19 mois où il fut premier ministre de la province, Gédéon Ouimet n'a jamais subi le grand test électoral. Nous ne pouvons vraiment pas savoir de quel bois il se chauffait et quelles étaient ses convictions profondes. »

Le 25 novembre 1875, Gédéon Ouimet prendra parole à l'Assemblée législative pour révéler le fond de sa pensée sur le sujet. « Il est vrai, Monsieur, que lorsque j’avais l’honneur d'être le chef du gouvernement, j'ai dû résigner, parce que j’avais été abandonné par plusieurs de mes collègues qui ont laissé un navire que les vagues de la tourmente politique n'agitaient point et qui voguait avec orgueil, soutenu qu’il était par l’opinion publique ; il est vrai que plusieurs de mes amis politiques se sont inconsidérément laissé éblouir au grand mot de vertu d’honnêteté politique, prôné avec grand bruit par une certaine classe de charlatans politiques ! Ils se sont laissé effrayer par les accusations de fraude et de corruption que l’on attribuait si gratuitement aux anciens ministres. Pour moi, Monsieur, je n'ai pas hésité, je suis resté sur le navire aussi longtemps que j’ai pu garder avec moi, pour m’aider, ceux de mes collègues qui ont généreusement attaché leur fortune à la mienne [...]. Si j’avais pensé que quelques-uns de mes collègues avaient pu se rendre coupables d’aucun des actes qui ont été reprochés, ou si j’avais été moi-même assez oublieux de mes devoirs pour me rendre coupable ou participer à aucun acte de fraude ou de corruption, j’aurais bravé l’orage, j’aurais risqué l’avenir de mon parti et je l'aurais exposé à passer entre les mains de mes ennemis politiques que je combattais depuis que je suis en politique. Ma conduite a été toute différente ; j’ai fait le sacrifice de mes propres intérêts et de la haute position que j’occupais en faveur de mon parti, continuant par là la chaîne de sacrifices que tout bon partisan doit savoir faire et que j’ai faits pour maintenir les principes que j’ai toujours professés, et cela pour le bénéfice de mon parti. Je ne le regrette pas. Au début de l'affaire des Tanneries comme pendant l'enquête qui a eu lieu dans cette affaire à la dernière session, pendant les élections générales qui viennent de se terminer, et dans tout le cours du procès qui a été jugé le 30 octobre dernier et dont j’ai suivi toutes les phases et les incidents, j'ai marché la tête haute. Le rapport du comité à la dernière session, le résultat des élections générales et enfin le jugement lavent de toute accusation ou imputation de fraude ou de corruption le ministère Ouimet. »  

En guise d'épilogue de l'affaire, Marcel Hamelin termine en disant que « Middlemiss demeure en possession du lot des Tanneries. Quant à la ferme Leduc, elle ne deviendra jamais l’emplacement d’hôpitaux. En 1888, le gouvernement de la province en vendra une lisière à la compagnie du Chemin de fer de l’Atlantique et du Nord-Ouest pour 2 500 $ et le reste à Elizabeth Smart pour la somme de 16 050 $. Quatorze ans après la transaction, le prix de vente de la ferme Leduc indiquera clairement que le gouvernement Ouimet a bien échangé un bœuf pour un œuf. » 


PREMIER MINISTRE
 

Galerie nationale : Les gouverneurs et les premiers ministres de Québec 1867-1920. 1920.

Collection Alain Lavigne

Cadre du premier ministre Gédéon Ouimet. Photographe : J. E. Livernois Limitée Québec. 

Collection Assemblée nationale du Québec

Macaron du premier ministre Gédéon Ouimet. Production Le Macaronier. Vers 1980.

Collection Dave Turcotte

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Portrait du premier ministre du Québec Gédéon Ouimet.

Collection Dave Turcotte

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Portrait du premier ministre du Québec Joseph-Adolphe Chapleau.

Collection Dave Turcotte

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Portrait du premier ministre du Québec John Jones Ross.

Collection Dave Turcotte

Portrait du premier ministre du Québec Charles-Eugène Boucher de Boucherville.

Collection Dave Turcotte

Livre L'École polytechnique de Montréal, 1873-1923 : cinquantième anniversaire de fondation : historique de l'École, liste des anciens élèves. "La Revue trimestrielle canadienne" et "L'Association des anciens élèves de l'École polytechnique". 1924.

Bibliothèque et Archives nationale du Québec

Selon Frédéric Smith, « À Québec, en tant que premier ministre, Gédéon Ouimet habite le 58 de la rue Sainte-Ursule, autrefois connu comme étant le 40. Il y demeure également à l’époque où il était Surintendant de l’instruction publique, de 1876 à 1880. Cette maison est connue sous le nom de maison « William Morrison ». Celui-ci l’avait fait construire en 1825. Elle a été restaurée par les architectes Marc Bouchard et Associés : elle a alors retrouvée sa fenestration d’origine. Elle abrite huit foyers. Le Dr Colin Sewell, petit-fils de Jonathan Sewell, succéda à Gédéon Ouimet dans cette maison. De 1880 à 1895, c’est au 50 de la rue d’Artigny que Ouimet s’installe. Cette maison, située entre les rues Sainte-Amable et Sainte-Julie, est aujourd’hui disparue. 

 

La maison du 58 de la rue Sainte-Ursule possède quelques points d’intérêt, comme son escalier d’origine, ses foyers, certaines moulures de ceinture de plafond et le plancher d’origine conservé au deuxième étage. Ce plancher a cependant été retouché et revernis. La majeure partie de l’architecture de cette maison a cependant été transformée au cours du 20ième siècle. Les barreaux d’escalier du premier et deuxième étage ainsi que les moulures de montant d’escalier sont de fabrications récentes. Les murs et planchers présentent des revêtements récents. »

 

Catherine Lachaussée ajoute que « le 58, rue Sainte-Ursule, où vécut Gédéon Ouimet jusqu’en 1878, est typique de la fin du Régime français avec son mur coupe-feu et son toit à deux versants, mais elle a sans doute été modifiée sous le Régime britannique, pense Martin Dubois. Un indice? La porte d’entrée donnant directement sur l'escalier intérieur, très haute et alignée sur les fenêtres. C’est un classique sur les rues plus récentes du Vieux-Québec, comme Sainte-Geneviève, Saint-Denis ou D’Auteuil, et un détail typique des maisons londoniennes. Des rénovations plus récentes lui ont permis de retrouver sa fenestration d’origine. »

Photographie de la résidence du premier ministre Gédéon Ouimet située au 58 de la rue Saint-Ursule à Québec. 2022.

Collection Dave Turcotte

Le surintendant

En novembre 1875, le premier ministre Charles-Eugène Boucher de Boucherville propose une réforme de la loi sur l’Instruction publique de 1868 en collaboration avec l’épiscopat. Le projet de réforme prévoit la création d’un surintendant soumis aux directives du Conseil de l’Instruction publique, chargé de mettre en œuvre la politique scolaire, de présenter un rapport annuel et d’exposer les besoins financiers du système scolaire. Le projet rétablit le département de l’Instruction publique et modifie la composition des comités catholique et protestant du conseil.

 Nommé surintendant de l'Instruction publique 

 

Le Dictionnaire biographique du Canada raconte : « Désormais, le comité catholique comprendra tous les évêques résidant au Québec et un nombre égal de laïques ; le comité protestant aura un nombre de membres égal au nombre de laïques dans le comité catholique. La nouvelle loi, sanctionnée le 25 décembre 1875, consacre la division confessionnelle du système scolaire, confère à l’Église catholique une influence étendue au Conseil de l’instruction publique et contribue à perpétuer au Québec le phénomène des “deux solitudes”. Boucher de Boucherville a justifié la nomination d’un surintendant par le fait que la charge de ministre de l’Instruction publique est trop lourde pour un premier ministre et qu’il est difficile de trouver dans la même personne les compétences requises pour les deux postes. Il cherche un “homme compétent sur la matière, dévoué, ami de l’éducation et pouvant consacrer tout son temps à cette tâche difficile”. Le 28 janvier 1876, il nomme Ouimet à ce poste. Il y a là plus qu’une récompense politique : Ouimet, de par ses fonctions de procureur général, puis de ministre de l’Instruction publique, a suivi l’évolution de la législation scolaire et, avec son ami Chauveau, a à quelques reprises discuté de cette question avec l’épiscopat. De l’ancien surintendant Jean-Baptiste Meilleur, il a retenu l’idée qu’un système d’inspectorat est la clef de l’efficacité d’un système scolaire ; de Chauveau, que l’industrialisation du Québec requiert une main-d’œuvre formée dans les arts mécaniques, ce qui l’avait amené en 1873 à appuyer la fondation de l’École polytechnique de Montréal et à favoriser les écoles du soir ; des inspecteurs d’écoles, qu’il a rencontrés trois jours à l’été de 1873, les conditions difficiles dans lesquelles travaillaient les instituteurs et les institutrices. »

 

En accédant à la fonction de surintendant de l’Instruction publique, son siège de député devient vacant le 28 janvier 1876.

 

1 an plus tard

Le Dictionnaire biographique du Canada avance que, « le 22 mars 1876, le nouveau Conseil de l’instruction publique tient sa première réunion sous la présidence de Ouimet. Il reconnaît aux comités catholique et protestant une large autonomie dans leur sphère d’action, tant et si bien que le conseil lui-même n’aura à se réunir qu’en de rares occasions. Il forme un comité spécial pour réformer le système d’inspectorat ; il décide d’introduire la méthode Walter Smith, alors en vogue aux États-Unis et dans le reste du Canada, dans l’enseignement du dessin et il discute de l’établissement d’un dépôt de matériel scolaire dans le département de l’Instruction publique, qu’une loi récente autorise. Cette loi suscite une vive opposition des libraires, de certains parents et de membres du clergé. On lui reproche de conférer un monopole au surintendant, de forcer les municipalités à distribuer gratuitement du matériel scolaire et de favoriser l’uniformisation des manuels. En 1880, sans consulter le Conseil de l’instruction publique, le gouvernement abolit cette loi. Cet incident n’est pas un fait isolé, mais l’un des épisodes de la guérilla qui, en matière d’instruction publique, oppose libéraux et ultramontains. »

 

Le Dictionnaire biographique du Canada continue : « De 1876 à 1888, ce conflit tourne autour de deux questions : l’emploi de religieux et de religieuses en lieu et place de laïques et la mise en place de cadres institutionnels qui réduiraient évêques et curés au rôle d’auxiliaires de l’État. La presse ultramontaine, tout particulièrement entre 1881 et 1883, ne cesse de s’en prendre à l’orthodoxie de certains fonctionnaires du département de l’Instruction publique qui chercheraient à dépouiller les parents et les curés de leurs responsabilités. Ces campagnes de presse agacent, mais elles ont peu d’impact sur la législation de 1880 à 1887 ; le gouvernement légifère une douzaine de fois, mais deux lois seulement ont une réelle importance : celle qui abolit le dépôt des livres (1880) et celle relative à la caisse de retraite des instituteurs (1886). Puis, c’est le gouvernement d’Honoré Mercier qui tient le surintendant sur la corde raide. Les libéraux radicaux reprennent épisodiquement l’idée d’un ministère de l’Instruction publique. Mercier manœuvre pour introduire ses créatures dans le comité catholique et, dit la rumeur publique, envisage de remplacer Ouimet par Paul de Cazes, son beau-frère et futur sous-ministre du ministère que projettent les radicaux. La chute du cabinet Mercier fait baisser la pression. »

 

En raison de son âge, Ouimet demande, le 26 mars 1895, de prendre sa retraite après 29 ans de service. Elle devient effective en avril 1895. Il conserve cependant son siège au Conseil de l’instruction publique.

 

Le Dictionnaire biographique du Canada trace ainsi le bilan de ces années : « Gédéon Ouimet n’a pas marqué le système scolaire de la province de Québec de la même manière que Jean-Baptiste Meilleur, qui en a jeté les bases, et Pierre-Joseph-Olivier Chauveau, qui l’a organisé. Avec des moyens modestes, dans un climat tendu par de vaines querelles idéologiques, au sein d’une population relativement indifférente aux bienfaits de l’instruction publique, il a accompli avec tact, zèle et impartialité les obscures tâches administratives qui ont assuré le développement harmonieux du système. »

Surintendant


LE SURINTENDANT
 

Lois sur l'Instruction publique dans la province de Québec ayant appartenu à Gédéon Ouimet. 1877.

Collection Dave Turcotte

Histoire du Conseil de l'instruction publique de la province de Québec 1856-1964. Livre de l'historien Louis-Philippe Audet publié aux Éditions Leméac en 1964.

Collection Dave Turcotte

Livre Les Guêpes Canadiennes signé par Gédéon Ouimet. 1881.

Collection Jérémie Poirier

Portrait du premier ministre du Québec Honoré Mercier.

Collection Dave Turcotte

École primaire à l’ouverture, le bâtiment a changé de vocation en 1978. « Le Centre Gédéon-Ouimet de la Commission scolaire de Montréal a été nommé en son honneur. Cette institution publique dessert annuellement environ 1 200 élèves inscrits à l’un de ses trois programmes de formation : l’enseignement général relié aux études secondaires, un autre en alphabétisation-francisation et la formation Français de transition destinée surtout aux jeunes allophones âgés seize ans et plus. Construit par Joseph Venne en 1914, ce centre, qui fait partie du patrimoine architectural de la Ville de Montréal. » - Wikipédia

Photographies du Centre Gédéon-Ouimet situé au 1960 de la rue Poupart à Montréal. 2020.

Collection Dave Turcotte

Citoyen

Le citoyen

 Nommé conseiller législatif 

Le 2 mai 1895, Gédéon Ouimet est nommé au conseiller législatif de la division de Rougemont. Il prend ainsi le siège de Pierre Boucher de La Bruère, qui le remplace comme surintendant. Selon le Dictionnaire biographique du Canada, « il participe activement aux débats du Conseil législatif, qu’il rehausse par sa droiture, sa compétence et ses talents oratoires. »

 

Implication

Gédéon Ouimet est président de l’Association Saint-Jean-Baptiste de Montréal en 1869 et en 1870, ainsi que de l’Institut canadien-français de Montréal en 1872. Il accepte aussi le poste de commissaire à l'Exposition industrielle de Londres en 1886.

 

Distinctions

Au fil des ans, Gédéon Ouimet reçoit diverses reconnaissances. Il est fait officier de l’Instruction publique par le gouvernement français en 1878. Il nommé commandeur de l’Ordre de Saint-Grégoire-le-Grand en 1886. Il est membre de l’Académie des arcades de Rome. Il reçoit un doctorat honorifique en droit de l’Université Laval et un du Collège Bishop’s de Lennoxville.

 

Décès

Gédéon Ouimet meurt en fonction (conseiller législatif) le 23 avril 1905 à l’âge de 81 ans et 10 mois à Mont-Saint-Hilaire, au terme d’une longue maladie. Il est inhumé le 26 avril 1905 au cimetière Notre-Dame-des-Neiges, à Montréal.


LE CITOYEN
 

Photographie de l'honorable Gédéon Ouimet. Photographe : Livernois. Vers 1890.

Bibliothèque et Archives nationale du Québec

Photographie de Gédéon Ouimet. Photographe : L. P. Vallée. Vers 1905.

Bibliothèque et Archives nationale du Québec

Mosaïque des députés et conseillers législatifs du Parlement de Québec. Photographe : Montminy et cie. 1901. 

Fonds Assemblée nationale du Québec

Mosaïque des députés et conseillers législatifs du Parlement de Québec. Photographe : Montminy et cie. 1905. 

Fonds Assemblée nationale du Québec

Celle qu'on nomme la « Maison Barcelo » a déjà été la résidence du notaire Timothée Pigeon, du député fédéral Guillaume Cheval et du deuxième premier ministre Gédéon Ouimet. Un passé politique qui perdure encore aujourd’hui, puisqu’elle loge actuellement un sénateur canadien.

 

Selon Frédéric Smith, « Gédéon Ouimet vit la majeure partie de sa vie à Saint-Hilaire, au 350 chemin des Patriotes Nord. Cette maison au toit en mansarde est depuis peu la propriété de M. J.N. Lavallée. Gédéon Ouimet est décédé dans cette résidence construite en 1872. Le terrain, situé face au Richelieu, fait 99 000 pieds carrés, dont 18 000 pieds carrés au bord de l’eau. Son toit mansardé lui confère une allure ancienne, mais l’ensemble architectural a été grandement retouché, entre autre au moment d’y ajouter un solarium à l’arrière. »

Photographies de la résidence du premier ministre Gédéon Ouimet située au 350 du chemin des Patriotes Nord à Mont-Saint-Hilaire. 2022.

Collection Dave Turcotte

Lieu de sépulture du premier ministre Gédéon Ouimet.

Collection Dave Turcotte

Je me souviens

Lieux de mémoire

Découvrez (virtuellement) les régions du Québec à travers la vie de nos premiers ministres. Cette carte interactive vous fera découvrir où ils sont nés, où ils ont habités, étudiés, travaillés ainsi qu’où ils sont décédés et enterrés. Elle indique aussi les quelques musées à visiter, les monuments en leur honneur ainsi que les lieux rappelant leur mémoire par la toponymie. Cette carte est loin d’être exhaustive. Elle sera toujours en développement. 

Légende de la carte

Jemesouviens


JE ME SOUVIENS
 

 

 

Photographies de panneaux de voies de communication rendant hommage au premier ministre Gédéon Ouimet. 

Collection Dave Turcotte

 

Une région politique

Gilles Boileau rappelle que «Depuis 1867, la province de Québec a connu une trentaine de premiers
ministres. Quatre de ces éminents personnages appartenaient à la région limitrophe de la rivière des Mille-Îles, d’une façon ou d’une autre. C’est sans doute le plus ancien, et le moins connu, de ces personnages
[…]. C’est Gédéon Ouimet qui fut le premier fils de cette région à devenir premier ministre du Québec. Ces quatre députés et premiers ministres appartenaient au parti conservateur : [Gédéon] Ouimet, [Joseph-Adolphe] Chapleau, [Louis-Olivier] Taillon et [Paul] Sauvé. »

Il ajoute que « l’une des plus anciennes paroisses de l’île Jésus, Sainte-Rose a fourni au Québec un certain nombre de personnages qui ont marqué son histoire. Ainsi, c’est sur les bords de la rivière des Mille-Îles que sont nés outre Gédéon Ouimet, le curé Antoine Labelle et le peintre Marc-Aurère Fortin. Chacun d’entre nous connaît assez bien l’histoire du curé Labelle, curé de Saint-Jérôme de 1868 à 1891, mais qui fut surtout le grand apôtre de la colonisation des Laurentides. De même, la renommée de Marc-Aurèle Fortin n’est plus à faire. Mais quels sont ceux qui savent que Gédéon Ouimet fut déjà premier ministre du Québec ? […] Combien, parmi les centaines de milliers d’usagers de l’autoroute des Laurentides et du pont Gédéon-Ouimet savent que ce toponyme honore un ancien premier ministre de la province ? Il n’est pas facile de bien saisir la véritable dimension de ce dénommé Ouimet et de comprendre les nombreux méandres suivis au cours d’une carrière étonnante. Le journaliste et analyste politique Laurent Laplante disait de lui en 1981 qu’il était “l’exemple type du paradoxe politique”. »

 

Bien que peu des Québécois se souviennent de Gédéon Ouimet, il faut souligner que sa carrière publique dure 53 ans. 

Laval se souvient

Parcourir Laval propose des dizaines de bijoux patrimoniaux à découvrir, lesquels regorgent d'histoires à vous raconter. Choisissez un parcours, naviguez à travers ses différents points d'intérêt, et laissez-vous emporter par leur histoire. ​Les plus anciens lieux et bâtiments la​vallois n’auront plus aucun secret pour vous !  

 

Écoutez l'extrait audio ​sur Gédéon Ouimet

Histoire de raconter Le Vieux-Sainte-Rose

Photographie de l'application Parcourir Laval.

Ville de Laval

Sources

Livres

Achintre, Auguste (1871). Manuel électoral : portraits et dossiers parlementaires du premier parlement de Québec. Montréal : Ateliers typographiques de Duvernay, frères.

Assemblée nationale du Québec (1980). Répertoire des parlementaires québécois 1867–1978. Québec : Assemblée nationale.

Bélanger, Réal, Marc Vallières et Richard Jones (1990). Les Grands débats parlementaires, 1792-1992. Québec : Les Presse de l'Université Laval.
 

Blais, Christian, Gilles Gallichan, Frédéric Lemieux et Jocelyn Saint-Pierre (2008). Québec, quatre siècles d'une capitale. Québec : Les Publications du Québec.

Commission de la Capitale nationale du Québec (1999). Je me souviens. Les monuments funéraires des premiers ministres du Québec. Québec : Commission de la Capitale nationale du Québec.

David, L.-O. (1913). Les Patriotes de 1837-1838. Montréal : Librairie Bauchemin Limitée. 

Desrochers, Lucie (2021). Sir Henri-Gustave Joly de Lotbinière : Un premier ministre improbable. Québec : Les Éditions du Septentrion.

Fortin, Lionel (1979). Félix-Gabriel Marchand. Saint-Jean-sur-Richelieu : Éditions Mille Roches.

Guay, Jean-Herman et Serge Gaudreau (2018). Les élections au Québec : 150 ans d’une histoire mouvementée. Québec : Les presses de l’Université Laval.

Hamelin, Marcel (1974). Les premières années du parlementarisme québécois (1867-1878). Québec : Les Presses de l'Université Laval.

Lacoursière, Jacques (1997). Histoire populaire du Québec. De 1841 à 1896. Montréal : Éditions du Septentrion.

Lamarche, Jacques (1997). Les 27 premiers ministres. Montréal : Éditions LIDEC.

Ouimet, André (2006). Journal de prison d'un Fils de la Liberté, 1837-1838 [texte établi, présenté et annoté par Georges Aubin]. Montréal : Typo.

Smith, Frédéric. Les résidences des premiers ministres du Québec. Québec : Commission de la Capitale nationale du Québec.

Articles

Boileau, Gilles. (mars 2000). Gédéon Ouimet : un Premier ministre oublié depuis longtemps. Histoire Québec, Volume 5, numéro 3.

Lachaussée, Catherine (2020). 12 demeures de premiers ministres à découvrir dans le Vieux-Québec. Radio-Canada (Montréal).

Audiovisuel

Livernois, Jonathan. (2021). « Le scandale des Tanneries, ou quand l'échange de terrains fait tomber des politiciens », dans Le 15-18. Montréal : Ici Première.

 

Sites 

Assemblée nationale du Québec

Dictionnaire biographique du Canada (Gédéon Ouimet)

Dictionnaire biographique du Canada (André Ouimet)

Histoire de raconter Le Vieux-Sainte-Rose

Wikipédia

Wikipédia (gouvernement)

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